Vers une alimentation plus saine : l’Algérie peut-elle relever le défi du bio ?
Zaki Hariz, président de la Fédération Algérienne des Consommateurs, plaide pour une mobilisation collective autour de la production agroalimentaire biologique.
À l’occasion de l’Agora des Experts organisée lundi à Djazagro, la Fédération Algérienne des Consommateurs a été représentée par son directeur exécutif, Mohamed Toumi, au nom de son président, Zaki Hariz. Expert reconnu en contrôle de la qualité des produits alimentaires et directeur d’un centre technique d’analyse, M. Hariz a partagé avec notre rédaction sa vision et ses propositions concrètes pour structurer le développement du bio en Algérie. Une réflexion essentielle à l’heure où les attentes des consommateurs évoluent vers plus de naturalité, de sécurité et de durabilité.
Pourquoi est-il urgent aujourd’hui de s’intéresser au développement du bio en Algérie ?
Le consommateur algérien est de plus en plus exigeant vis-à-vis de sa santé et de sa sécurité. Cela s’explique notamment par l’augmentation du nombre de personnes atteintes de cancer, tous types confondus. Cette situation pousse les citoyens à s’interroger sur ce qu’ils consomment. Les industriels doivent donc être à l’écoute, suivre les tendances et répondre aux attentes. C’est aussi une condition essentielle s’ils veulent exporter leurs produits à l’international.
Les industriels algériens sont-ils prêts à répondre à cette demande ?
Oui, nous avons échangé avec plusieurs d’entre eux, notamment dans les secteurs du lait et dérivés, des céréales ou encore de la conserverie. Ils ont exprimé une réelle volonté de développer cette niche. Cependant, ils se heurtent à un obstacle majeur : l’approvisionnement en matières premières issues de l’agriculture ou de l’élevage biologiques. Ces produits sont encore rares, tant sur le marché national qu’international, et leur prix est plus élevé que celui des produits conventionnels.
Que recommandez-vous pour surmonter ces difficultés ?
Il est indispensable que tous les acteurs concernés – pouvoirs publics, agriculteurs, industriels, experts et associations de consommateurs – unissent leurs efforts. Il faut accompagner les agriculteurs et les investisseurs agricoles dans une démarche de conversion partielle de leurs exploitations vers le bio, afin d’assurer un approvisionnement stable pour l’industrie agroalimentaire.
Quel rôle joue selon vous l’Agora des Experts dans cette dynamique ?
Elle contribue à valoriser les innovations présentées par les exposants du salon, tout en sensibilisant les industriels aux nouvelles tendances du marché. C’est un espace d’échange utile et stimulant.
Et plus largement, comment percevez-vous l’évolution du salon Djazagro ?
Djazagro prend de l’ampleur d’année en année. C’est un événement qui évolue positivement, et cela est logique car l’alimentation reste un besoin fondamental du consommateur. Ce salon est devenu un rendez-vous incontournable pour tout l’écosystème agroalimentaire.
L’agriculture bio en Algérie : un potentiel à cultiver
La filière agroalimentaire biologique en Algérie commence à s’organiser, portée par une prise de conscience collective autour de la santé et de l’environnement. Si les surfaces certifiées bio restent encore modestes — moins de 1 % des terres agricoles — le nombre de producteurs engagés connaît une progression notable, avec plus de 200 exploitations recensées à ce jour. L’essor du bio touche notamment les filières stratégiques comme les dattes et l’huile d’olive, deux produits à fort potentiel à l’export.
Soutenue par les pouvoirs publics à travers la mise en place d’une direction dédiée et des programmes de formation, cette dynamique reste toutefois freinée par le coût élevé de la certification, l’accès limité aux intrants bio et un encadrement réglementaire encore en construction. Malgré ces défis, les perspectives sont prometteuses : la demande locale ne cesse de croître, et l’Algérie dispose d’atouts majeurs pour devenir un acteur bio crédible sur les marchés régionaux et internationaux.